INTRODUCTION
Depuis le début de la démocratisation en 1990 en R.D.C, on assiste à la résurgence de la fausse conscience ethnique. La chasse aux Kasaïens dans la province du Katanga , les affrontements ayant opposé les ressortissants congolais aux Banyarwanda au Kivu, de même que les Lendu au Hema en Ituri dans la Province Oriental. L’apparition du mouvement « politico-religieux » appelé « Bundu dia Congo » au Bas Congo ainsi que celle du « CNPD » au Kivu sont à mettre sur le compte de la prolifération de fausses consciences ethniques.Le développement desdites consciences s’expliquerait notamment par :
1° une stratégie du régime mobutiste. Ladite stratégie a consisté à vouloir faire accréditer l’opinion que les congolais ne seraient pas prêts à adopter le multipartisme d’où la création par le pouvoir de plusieurs foyers de tension dits ethniques. On comprend pourquoi les leaders ethnicistes n’étaient ni politiquement ni judiciairement inquiétés.
Et comme en Afrique, l’Etat a précédé la nation, contrairement aux pays européens (F. Chatelet et E. kouchner; 1980), la conscience centrifuge y est très développée;
2° L’ethnicité n’est en fait qu’un trait de compétition politique. Cela est d’autant plus plausible que nous sommes dans un système d’économie où le secteur privé est faible. Seul l’Etat, en dehors de multinationales, est le principal investisseur et employeur. Conséquence, tous les africains en général, et congolais en particulier se battent pour occuper un poste politico administratif afin d’en tirer un profit personnel (Lohata, 2002). Personne dans ces conditions, ne veut entrer ou rester dans l’opposition même battue en bonne et due forme ; car contrôler l’Etat équivaudrait à contrôler des richesses : l’expression de politique de vendre (J.F. Bayart, 1989) est ici appropriée.
Ce qui est propre, aux Etats en cours de construction comme la R.D .C, c’est le fait que les règles de compétition politiques ne sont pas définies rationnellement, encore moins consensuellement. L’ethnicité apparente n’est qu’en réalité, un moyen stratégiquement détourné pour accéder au pouvoir. Les luttes dites ethniques sont en réalité des luttes politiques, des compétitions sociales pour accéder aux avantages socio-économiques, symboliques et aux positions dominantes.
3° L’ethnicité est une « fausse conscience », elle porte rarement sur des traits culturels au sens anthropologique. Elle est l’œuvre de la classe dominante, porteuse de la culture occidentale, que C. Coulon qualifie de l’Elite modernisante. On croit que l’on est dans les revendications ethniques, alors qu’en réalité on est ailleurs. Il s’agit d’une fausse conscience, artificiellement et stratégiquement construite.